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LA VERSION PRONONCÉE FAIT FOI

Monsieur le Président, la semaine dernière, le Canada a perdu la seule souveraine que la majorité d’entre nous ait connue.

C’est important de prendre ces moments ici, au Parlement, et à travers le pays pour reconnaître le service et le leadership qu’elle nous a offerts.

Quand une personne atteint 96 ans, son décès ne devrait pas nous surprendre. Et, pourtant, son absence soudaine nous a tous profondément bouleversés.

Sa Majesté nous accompagnait partout.

Son visage était sur nos pièces de monnaie.

Son portrait était exposé au Parlement et dans nos bureaux de poste.

Ses vœux de Noël étaient télédiffusés et représentaient une tradition réconfortante pour nous, d’un océan à l’autre.

Pour bon nombre d’entre nous, la Reine était si importante.

Elle affichait une humilité et une compassion rassurantes.

J’ai eu la chance de connaître Sa Majesté durant toute ma vie.

Je l’ai rencontrée pour la première fois en 1977, quand je n’étais encore qu’un petit garçon.

Quand je l’ai revue une quarantaine d’années plus tard, en 2015, alors que j’étais devenu premier ministre, je lui ai dit à la blague que, la dernière fois que nous nous étions vus, elle était plus grande que moi.

Pour plaisanter, elle m’a répondu qu’elle se sentait vieille, tout d’un coup.

Son sens de l’humour était l’une de ses nombreuses grandes qualités.

Et l’une des raisons pour lesquelles elle était l’une de mes personnes préférées dans le monde.

Elle tenait à son rôle de Reine du Canada – notre reine, notre chef d’État.

Ses conversations avec moi étaient toujours franches.

Nous parlions de tout et de rien.

Elle donnait d’excellents conseils sur divers sujets.

Elle était toujours curieuse, intéressée et gentille.

Les Canadiens lui seront toujours redevables pour ses conseils.

D’une certaine façon, tout le monde la connaissait.

Les Canadiens ont le sentiment d’avoir perdu un membre de leur famille – un membre de la famille qui a grandi avec eux.

Elle n’avait que neuf ans quand elle a fait ce qui était peut-être son premier devoir officiel au nom du Canada – figurer sur un timbre.

C’était en 1935.

Sa Majesté était là lors d’anniversaires importants – comme en 1967, quand elle a découpé le gâteau du centenaire du Canada sur la Colline du Parlement.

Notre pays a atteint sa maturité sous son règne.

C’est Sa Majesté qui a proclamé et signé la Loi constitutionnelle de 1982 et la Charte canadienne des droits et libertés.

Ces fondements de notre démocratie contribuent à la stabilité de notre pays et à notre liberté.

Sa Majesté se sentait chez elle au Canada.

Elle est venue au Canada plus souvent que dans n’importe quel autre pays.

Dans ses mots à elle d’il y a quelques années : « Que ce soit en assistant à une course de chariots au Stampede de Calgary ou devant les prouesses athlétiques des Jeux olympiques de Montréal, que ce soit en écoutant une chanson inuite de bienvenue au Nunavut ou le son de la cornemuse en Nouvelle-Écosse, je me suis toujours sentie non seulement la bienvenue, mais aussi chez moi au Canada ».

La Reine avait une appréciation profonde de notre culture.

En 1964, elle avait dit qu’elle était heureuse de savoir qu’il existait dans notre Commonwealth un endroit où on s’attendait d’elle qu’elle s’exprime officiellement en français.

C’est une langue qu’elle aimait beaucoup et qu’elle parlait de manière impeccable.

Monsieur le Président, les gens ont eu recours à différents mots pour décrire les qualités qui définissent l’héritage de Sa Majesté.

Des mots comme : « devoir », « service », « dévouement » et « stabilité ».

Chacun de ces mots met en valeur des aspects légèrement différents de ce qu’elle nous a donné.

Quand nous pensons au mot « devoir », nous réfléchissons à la façon dont la Reine incarnait la Couronne par-dessus tout.

Au dernier geste public qu’elle a accompli, et qui était de nature constitutionnelle, quand elle a invité la nouvelle première ministre du Royaume-Uni à former le gouvernement.

Et elle a fait sa dernière déclaration publique pour offrir ses condoléances aux survivants et aux proches des victimes de la tragédie survenue en Saskatchewan.

Quand nous pensons au mot « service », nous nous souvenons qu’en 1945, celle qui était encore la princesse Elizabeth a revêtu l’uniforme et s’est jointe aux efforts des alliés – y compris à ceux de plus d’un million de Canadiens – durant la Deuxième Guerre mondiale.

Lorsque nous pensons à son « dévouement », nous nous souvenons des images et des histoires de Sa Majesté en tant qu'épouse, mère, grand-mère et arrière-grand-mère.

Nous pensons à sa famille dévouée qui est en deuil avec beaucoup de grâce et d'amour pour elle.

Mais surtout, lorsque nous pensons à Sa Majesté la reine Elizabeth II, nous pensons à la stabilité qu’elle nous a apportée.

Son règne de 70 ans est inégalé. En juin dernier, nous avons célébré le tout premier jubilé de platine d'une souveraine canadienne.

Durant son règne, le Canada a connu une paix et une prospérité extraordinaires.

Comme l'a dit le premier ministre Louis St-Laurent lorsqu'il s'est adressé à cette Chambre après la mort du roi George, son père, en 1952 : « Nous avons, dans nos nations du Commonwealth, un système de gouvernement aussi libre que n'importe quel autre sur terre ».

Monsieur le Président, le monde se trouve aujourd'hui dans une situation difficile.

Nous avons tous été secoués par une pandémie mondiale sans précédent.

La guerre brutale et injustifiable du président Poutine menace la stabilité à l’échelle mondiale.

Et, aux quatre coins du globe, les institutions démocratiques sont remises en question.

Mais les Canadiens peuvent être fiers de vivre dans l'une des démocraties les plus fortes du monde.

Nos institutions sont saines.

Nos débats sont dynamiques.

Et nous jouissons d'une stabilité et d'une résilience enviables malgré les croyances, origines et perspectives diverses des Canadiens – et, surtout, grâce à celles-ci.

C'est de cette force et de cette stabilité, représentées par la Couronne et incarnées par la Reine, que les Canadiens ont toujours bénéficié.

Et, en tant que parlementaires et Canadiens, nous nous consacrons chaque jour à ces principes démocratiques.

Chacun et chacune d'entre nous qui siégeons ici dans cette Chambre a choisi de servir sa communauté et notre pays.

Nous le faisons en sachant parfaitement que les défis que nous devons relever en tant que titulaires d'une charge publique sont limités dans le temps.

Mais pour Sa Majesté, le service public était toute sa vie, jusqu'à ses derniers instants.

Elle était animée d'un engagement indéfectible et durable à servir les autres et à bâtir un monde et un avenir meilleurs.

Nous tous rassemblés ici savons que le service exige des sacrifices. Et la Reine a consenti ces sacrifices avec grâce.

Sa générosité et son dévouement sont exemplaires. Ils nous rappellent toute l’importance des fonctions que nous assumons chaque jour en tant que députés de cette Chambre. Ils nous motivent à aller de l’avant.

Dans notre monarchie constitutionnelle, la Couronne a pour fonction, au sein de notre gouvernement, d'être le fondement de notre constitution et de transcender les débats politiques quotidiens.

Notre nouveau roi, Sa Majesté le roi Charles III, a démontré son engagement envers l'histoire avec un grand « H » lors de sa dernière visite, qui a notamment mis l'accent sur le travail qu’il faudra effectuer pendant des générations pour parvenir à la réconciliation et lutter contre les changements climatiques.

La stabilité de nos principales institutions démocratiques rassure les Canadiens et leur procure une certaine tranquillité d'esprit. Ainsi, nous pouvons tous nous concentrer sur les enjeux les plus importants.

Comme prendre soin des gens, de notre économie, de nos communautés et de notre planète.

Monsieur le Président, avant de terminer, je tiens à présenter, au nom de tous les Canadiens, mes sincères condoléances à la famille royale.

Cette fin de semaine, je vais me rendre à Londres avec des anciens premiers ministres et gouverneurs généraux pour assister aux funérailles d’État de Sa Majesté, qui auront lieu lundi.

Ce même jour, pour marquer son décès, le Canada observera un Jour de deuil national et organisera une cérémonie de commémoration.

J'espère que, lundi prochain, les Canadiens d'un océan à l'autre pourront prendre quelques instants pour réfléchir à l'héritage incomparable de Sa Majesté et à ce qu'elle représentait de mieux.

Monsieur le Président, Sa Majesté la reine Elizabeth II a rempli ses obligations et servi son peuple jusqu'à son dernier jour. Elle a été là pour nous tous jusqu'à ses derniers instants.

Elle nous manquera énormément.

Mais je sais que notre nouveau souverain, Sa Majesté le roi Charles III, défendra ces mêmes valeurs dont nous parlons aujourd'hui – et poursuivra son héritage.

Vive le Roi.